des infrastructures civiques de rsilience
1 - Diffusion du processus Tiers-Lieux dans l’espace public : des infrastructures civiques
Les enjeux et les impacts de cette expérience temporaire et inédite que représente la crise sanitaire récente, repositionne le processus des Tiers Lieux au cœur des débats sur la résilience des territoires. La rupture brutale engendrée par cette crise produit un effet de recentrage sur ce qui fait la singularité et l’essence première du mouvement des Tiers Lieux.
Ce qui pouvait être perçu comme un potentiel autour des modèles en transition et des changements de paradigme (fabriques de territoires), devient maintenant une réalité effective à laquelle il faut pouvoir donner des réponses concrètes dans la reconstruction d'une solidité individuelle et collective et l'autonomie économique des territoires. La covid19 a montré l’engagement des citoyens dans la société civile et spécifiquement les acteurs en charge des autres ; personnels sanitaires, EHPAD, jusqu’aux makers sans parler des actes de solidarité entre voisins dans l’aide aux personnes âgées. Ce phénomène d’entraide et d’attention à l’autre fait justement partie du principe même des Tiers Lieux dans la configuration ouverte pair à pair, d’échange de savoirs et savoir-faire, et crée des espaces de réciprocité, d'altruisme et d'équité. Cette rupture économique, sociale et finalement rupture de vie, dans le contexte du changement climatique et de l’anthropocène, met à jour une exigence de résilience dans les territoires. Il reste maintenant à construire un dialogue structuré et ouvert entre les processus Tiers Lieux portés par des organisations communautaires, des collectifs, et les collectivités en charge des politiques publiques.
Ce recentrage vers ce qui est essentiel questionne à nouveau l’identité du concept de Tiers Lieux où il semble nécessaire de rappeler un certain nombre d’invariants constituant un noyau dur à partir duquel, de manière liquide et protéiforme, il peut prendre les couleurs et des orientations très variées, informelles et évolutives dans le temps et dans l’espace
-Un tiers-lieu n’est pas un lieu mais un processus qui peut s’incarner dans un espace ou pas
-Il est constitué par une communauté de contributeurs dans une logique ascendante et
devient le fruit de l’intelligence collective
-Il fonde son principe d’interaction sociale et de gouvernance sur le modèle de l’architecture distribuée « pair à pair » issu principalement des cultures numériques et de l’histoire des réseaux décentralisés
-Il peut adopter les principes du libre et de l’open source réactivant du même coup la question centrale des biens communs
On pourrait évidement affiner ces quelques principes, et la littérature aujourd’hui autour des Tiers Lieux est très abondante. Le wiki Movilab représente sans aucun doute la plateforme la plus conséquente en termes de capital informationnel sur le sujet dont chacun peut alimenter le code source
On peut préciser que ce qui s’appelle « Tiers Lieux » en France est évidemment mondial et prend des terminologies plurielles ailleurs (civic spaces, shared spaces, collective spaces, third spaces et évidemment fablabs, makerspaces, biohackerpaces etc.). A titre d’exemple, le simple répertoire des hackerspaces à l’échelle internationale, témoigne de ce mouvement de fond structurel, de ces utopies concrètes, qui sont les marqueurs d’un monde en transition. Ce processus est le fruit d’une longue histoire dont on décèle des éléments dès les monastères du Moyen Age, en passant par les communautés utopiques du 19ème siècle fouriéristes ou owenistes jusqu’aux utopies de la contre-culture américaine des années 1960 et de l’écologie politique. En France, dès 2009, le monde de la lecture publique avait investi les prémisses de ce processus dans la notion de « bibliothèque 3éme lieu » en parallèle à la question des biens communs numériques ; la bibliothèque devenant un espace de convivialité entre le travail et la maison favorisant l’interaction sociale et l’intergénérationnel.
Si tout est Tiers Lieux alors rien n’est Tiers Lieux
C’est en se basant sur ces quelques principes fluides qui détermine le processus Tiers Lieux que l’on peut entamer une réflexion autour de la résilience et définir les enjeux structurels que valorisent les communautés distribuées sur nos territoires.
Ce recentrement implique de désengager l’identité du Tiers Lieux de l’idéologie de l’innovation et de sa grammaire où tout est lab, smart, mix, remix etc. Il est curieux de constater que les anciens « pôles de compétitivité » et de prospective des années 2000 sont devenus des « living lab » pour maintenant s’intituler « Tiers Lieux ». Dans la même logique, l’agrégation des parties et des fonctions ne fait pas le tout. Ce n’est pas l’adjonction des services et fonctions d’un lieu qui fait Tiers Lieux ; Il peut y avoir dans le même espace un café, un fablab, une zone de coworking, une pépinière d’entreprises et une ressourcerie sans pour autant faire sens. Les équipements culturels hybrides qui ont affirmé la transdisciplinarité comme logique créative et principe de mixité des publics dans les années 90, ont posé les premières pierres mais ne sont pas nécessairement engagés dans un processus Tiers Lieux. C’est bien la communauté distribuée où le citoyen est contributeur, dans une gouvernance partagée, autour des biens communs, qui génère la transversalité du sens d’un projet quels que soient les services et les activités proposés
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