Les ESH ont ft leurs 90 ans avec Christophe Guilluy

Publish date: 2024-08-24

Les 230 entreprises sociales pour l’habitat, qui logent aujourd'hui 5 millions de personnes, ont fêté le 22 juin leurs 90 ans, lors de l'assemblée générale de leur Fédération.
L'activité des ESH se manifeste en 2016 par une accélération des mises en chantier de construction locative, en hausse de 9% par rapport à 2015. Le parc locatif, de 2,4 millions de logements, a ainsi augmenté de 83.000 logements. Celui de l’accession sociale a un peu grossi également, avec 3.090 logements commercialisés en 2016, dont 1.980 en location-accession et 1.110 en Vefa.
La vacance des logements dans les ESH est quasi stationnaire (3,8% contre 3,9% en 2015) et le taux de mobilité des locataires aussi avec 9,7% contre 10% en 2015. Il s'agit pourtant d'un "niveau historiquement bas", estime la Fédération, qui rappelle dans son rapport Analyses et Statistiques que le taux était de 10,2% en 2007. Cette baisse de mobilité est observée dans toutes les régions, sauf en Bretagne. Elle a été "significative" en Pays de Loire, Auvergne-Rhône-Aples et Grand Est, tandis que les DOM et l'Ile-de-France restent "les zones les moins fluides".

Pour Christophe Guilluy, "la politique de la ville crée de la classe moyenne depuis 30 ans"

"Déduction faite de 27.000 départs de locataires par mutation interne dans le patrimoine, près de 184.000 départs ont été recensés en 2016", précise le rapport. Du côté des entrants, la Fédération des ESH constate que deux nouveaux entrants sur trois vivaient, en 2016, en dessous du seuil de pauvreté.
Une statistique qui vient étayer le discours de Christophe Guilluy invité ce jour-là par les ESH. L'expert en "géographie sociale", ainsi qu'il se présente, se félicite que les habitants des ZUS (aujourd'hui QPV/quartiers prioritaires de la politique de la ville) soient "les plus mobiles de France". C'est que, selon lui, les ZUS jouent toujours leur rôle de "sas" dans le cadre d'un parcours résidentiel ascendant. "La politique de la ville crée de la classe moyenne depuis 30 ans sans qu'on ne le mesure, puisque les statistiques portent sur les stocks et non sur les flux", estime-t-il.
De fait, l'Union sociale pour l'habitat indique depuis longtemps que les nouveaux entrants dans le parc HLM sont plus pauvres que les sortants, et même de plus en plus pauvres d'année en année. Des années durant lesquelles l'Onzus *publie des chiffres de plus en alarmants. Or "ce ne sont pas les mêmes personnes que l'on observe", indique Christophe Guilluy. "Le jeune qui caillassait des voitures de police aux Minguettes dans les années 80, il a 50 ans aujourd'hui et il ne vit plus aux Minguettes", illustre le géographe. Valérie Fournier, présidente de la Fédération, nous rapporte pour sa part un phénomène en émergence : celui du couple ayant débuté sa vie de famille en HLM, puis ayant accédé à la propriété dans le périurbain, qui revient habiter dans le parc social pour se rapprocher des services publics urbains et... pour laisser leur maison individuelle à un enfant, ou un petit enfant... souvent au chômage.

"Ces acteurs de la France qui a du mal à gagner, nous les connaissons dans nos cages d'escalier"

Des histoires de vie qui raisonnent avec l'exposé de Christophe Guilluy sur sa vision développée notamment dans ses deux ouvrages à succès "La France périphérique : comment on a sacrifié les classes populaires" et "Le Crépuscule de la France d'en haut". "Nous avons un modèle économique mondialisé qui marche très bien dans les métropoles, mais qui ne fait pas société", a-t-il répété. A côté de quoi la "France des invisibles", une "France fragile socialement", ne trouve plus à se loger dans les parcs privés de ces métropoles. Métropoles qui seraient les seuls "moteurs de la croissance économique" du pays, et qui n'ont pas besoin de ces "invisibles" pour cela.
Les habitants des ex-ZUS situées "au cœur des grandes métropoles" vivent ainsi de plein fouet la croissance des inégalités autant sociales que culturelles.
Dans la salle, le public des ESH a vivement applaudi l'exposé. "Ces acteurs de la France qui a du mal à gagner, nous les connaissons dans nos cages d'escalier", a souligné Valérie Fournier en clôturant la journée. De ce fait, "les ESH doivent solidifier leur cœur de métier tout en valorisant leur rôle de 'trait d’union', de mise en réseau 'social' (logement, santé, éducation, lien social…) au service des locataires".

*Observatoire national des zones urbaines sensibles, aujourd'hui ONPV(Observatoire national de la politique de la ville)

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